Newsletter #25
Se former à Vigie-Nature École

Parmi toutes nos activités à Vigie-Nature École, il y a les formations : la nouvelle formation en ligne ou bien celles plus traditionnelles en face à face. Destinées aux professeurs du premier et second degrés, elles concernent aussi les conseillers pédagogiques qui peuvent se faire le relais du programme dans les écoles. L’objectif : vous donner des clés pour saisir les enjeux scientifiques, éducatifs de notre programme. Et vous donner des outils pour mettre en place facilement les protocoles. Qu’est ce qui est dit précisément ? Comment sont articulés les différents sujets ? Voici le déroulé d'une formation qui a eu lieu le 14 novembre dernier dans l’académie d’Orléans-Tours.

Premier point : qu’est-ce que la biodiversité ?

Cette notion est d’une importance capitale : expliquer ce que recouvre la biodiversité est un préalable pour aborder sa conservation. Qu’est-ce que la biodiversité, donc ? L’ensemble des animaux et des végétaux vivant dans un milieu, d’accord. Mais n’oublions pas la notion d’interactions, de liens entre espèces ; la biodiversité c’est la richesse du vivant à plusieurs échelles (symbioses, chaînes alimentaires, etc.).

Quelles menaces pèsent sur la biodiversité ?

Une fois qu’on a défini le terme, on peut alors expliquer les causes de son érosion. On les retrouve à trois niveaux : les sols – qui contiennent 30% de toute la biomasse de notre planète –, gravement affectés par l’étalement urbain (tous les ans, l’équivalent d’un département français est minéralisé !). Viennent ensuite les effets de l’agriculture intensive et enfin ceux du réchauffement climatique.

Lorsque l’on évoque la biodiversité menacée, il est facile d’émouvoir les enfants avec quelque espèces rares emblématiques et malheureusement gravement menacés, tels que l’oran outan ou l’ours polaire. Mais que peut faire un élève de sixième face à ce constat ?  Il se sent tellement éloigné du problème, impuissant… 

Sur 83 000 espèces menacées sur la liste de l’UICN, 24 000 le sont d’extinction. Sans compter toutes celles qui figurent dans d’autres catégories : « grave danger », « préoccupation importante », etc. Et parmi elles, une grande proportion d’espèces dites communes. Les insectes pollinisateurs des jardins ne se portent en effet pas beaucoup mieux que l’Orang-outan et l’Ours polaire. Ainsi la France est dans le top 10 des pays abritant le plus d’espèces menacées. 

Un peu déprimant certes. Est-ce trop tard pour agir ? Non !

Pourvu qu’on parvienne à sensibiliser, à montrer que la nature est en ville, dans les champs agricoles, partout autour de nous. Et pour beaucoup d’enfants, c’est loin d’être une évidence ! Plusieurs études ont été menées sur la déconnexion des jeunes avec la nature, notamment des citadins. En ressortent des chiffres qui donnent le vertige. Le temps cumulé passé à l’extérieur aurait été divisé par deux  entre 1997 et 2003. Au Japon, en 1998, 20% des jeunes n’avaient jamais capturé d’insectes ;  en 2008… le double !

D’où cette question qui vous concerne : est-ce que vous pouvez, vous enseignants, (re)créer un début de lien entre les enfants et la nature ? Oui ! Comment ? Nous proposons une réponse : les sciences participatives

Pourquoi les sciences participatives ?

Quelles espèces étudier ?

Le rôle de Vigie-Nature est d’étudier les espèces ordinaires : les papillons, les oiseaux des jardins, les chauves-souris ou les vers de terres. Ces animaux très sensibles à l’activité humaine sont d’excellents indices de l’état de la biodiversité dans un milieu. Ainsi, en suivant ces indicateurs sur un espace étendu (la France) et pendant un temps prolongé (plusieurs années), nous pouvons savoir s’il faut ou non prendre des mesures de conservations. Puis, en étudiant les impacts de plusieurs paramètres sur ces populations, chercheurs et décideurs pourront imaginer des stratégies de conservation.

Comment obtenir un grand nombre de données ?

Problème : pour pouvoir en tirer des tendances, les suivis de populations nécessitent un très grand nombre de données. Or, les chercheurs ne sont pas suffisamment nombreux pour pouvoir explorer tous les milieux, et la faune ordinaire ne fait l’objet d’études que depuis peu de temps. Pour ces raisons, les citoyens sont une véritable clé de voute : en commençant dès aujourd’hui à récolter des données - qui que vous soyez, ornithologue amateur ou élève de CE1 -, vous apporterez votre pierre à la construction de la connaissance scientifique.

Pourquoi standardiser les données ?

Seule exigence pour que les données recueillies soient exploitables par les chercheurs : la standardisation du protocole. Une seule et unique méthodologie pour tout le monde. Par exemple si une classe observe des oiseaux tous les jours une heure alors qu’une autre classe se contente de le faire qu’une fois par an pendant 10 min, il est difficile pour le chercheur de comparer quoi que ce soit. La durée est souvent imposée pour le comptage d’insectes comme pour les observations d’oiseaux. Pour les escargots en revanche, on préfèrera standardiser la taille de la planche. Un minium de rigueur garantit la reproductibilité des protocoles. Les contributions des bénévoles ont déjà permis d’apporter quelques résultats : ainsi depuis 20012, 98 articles scientifiques ont été publiés dans des revues et 10 thèses soutenues !

Vos données ne servent pas seulement la recherche. Elles permettent d’amener les élèves à pratiquer les sciences dans une approche participative et concrète. Justement, place à l’atelier.

Un exemple concret : l'Opération Escargots !

Les protocoles sont conçus pour être accessibles aux enfants, rapidement mis en place et permettant de voir les espèces pendant la période scolaire. Nous vous proposons un zoom sur l’un d’entre eux, parmi les plus simples : l'Opération Escargots.

Il s’agit de faire un suivi des populations d’escargots et de limaces dans l’enceinte de l’école et comprendre les liens entre populations observées et espaces verts. Est-ce qu’on observe moins de spécimens lorsque le jardinier tond régulièrement ses pelouses ? Ou lorsqu’on les traite avec des pesticides ?

Deux protocoles au choix selon les classes d'âges

On vous propose pour cela deux protocoles. Dans le premier, il suffit d’attendre qu’il pleuve, on équipe les élèves de bottes et d’un k-way et on déclare ouverte la chasse aux escargots dans l’école ! Si l’activité rencontre un fier succès chez des petits, difficile en revanche de motiver les collégiens. La solution : notre deuxième protocole. Il s’agit simplement de déposer une (ou plusieurs) planche en bois (40 cm sur 40) sur le sol. Une planche de bois brut et non traité. Et… d’attendre. Puis, un jour de beau temps, on peut venir la soulever et observer les escargots venus s’abriter dans une zone humide. Une seule contrainte : il faut placer les abris au moins un mois à l’avance. L’escargot étant ce qu’il est en termes de réactivité, laissons-lui le temps de rejoindre son abri. Vous pouvez laisser la planche 10 ans, elle n'en sera que plus attractive !

C’est parti pour la détermination, deux outils sont à votre disposition :

Capture d'écran

  • La « planche coquilles ». Elle se matérialise par une simple planche de détermination qu’on peut imprimer en format A4 (voir le livret de participation), sur laquelle on retrouve tous les escargots de France en taille réelle. On peut ainsi comparer et associer les spécimens fraîchement chassés avec les photos où figure le nom de l’espèce. Un moyen de détermination adapté pour les très jeunes, il suffit d’observer et savoir lire un nom pour identifier l’escargot.
  • La « clé de détermination ». Pour vous donner une image, c’est un peu comme dans un livre dont le lecteur est le héros, vous voyez ?  On lit un paragraphe avant de vous proposer d’aller en page 243 pour « tuer le dragon » ou en page 244 pour « visiter le château ». Là, on interroge l’élève sur des critères morphologiques : « avec ou sans coquille ? » S’il y a une coquille : « plus de 5 cm ou moins de 5 cm » etc. jusqu’à ce que l’on trouve l’espèce en question. Cet exercice correspond clairement à une démarche scientifique de naturaliste. Des mots de vocabulaire relativement complexes y figurent pour que les élèves apprennent quelques termes scientifiques. Mais rien de compliqué : pour chaque terme un peu abscon, un dessin nous vient en aide.

Ecoutez des retours sur le protocole : https://soundcloud.com/user-754592430/quavez-vous-pense-du-protocole

Interpréter ses observations

Après les déterminations, vous avez la possibilité d’interpréter les résultats. Quelles espèces sont les plus fréquentes ? Grâce aux bilans que nous envoyons chaque année, on va pouvoir se situer : est-on dans la moyenne ? A-t-on une forte ou une faible abondance de certaines espèces ? Arrive ensuite la question du mode de gestion : comment faire pour améliorer la biodiversité de l’école ? A partir de résultats obtenus par les chercheurs, on va pouvoir estimer s’il faut augmenter la présence de plantes, diminuer la tonte des pelouses, etc.

Une dernière chose sur laquelle nous insistons à la fin de la formation, c’est la saisie des données. Car sans saisie, pas d’accès aux données, vous ne participez donc pas à la recherche scientifique. Dommage ! Entrer les résultats sur le site est pourtant d’une facilité et d’une rapidité déconcertantes.

Quelques réactions de collègues :

https://soundcloud.com/user-754592430/pascale-breton

https://soundcloud.com/user-754592430/stephane-durand