Newsletter #27
Un printemps bien silencieux

A moins de ne pas avoir allumé votre télé, écouté la radio ou même ouvert un journal, vous avez probablement eu vent de la triste nouvelle révélée le jour du printemps : l'effondrement des populations d’oiseaux de nos campagnes.

Que nous apprennent ces études ?

Les données du STOC (Suivi Temporel des Oiseaux Communs, un observatoire de Vigie-Nature), collectées par des ornithologues amateurs et professionnels, ont permis aux scientifiques de produire des indicateurs annuels sur l'abondance des espèces dans différents habitats (forêt, ville, campagne etc.).
Les relevés effectués en milieu rural mettent en évidence une diminution des populations d'oiseaux (l’Alouette des champs, la Fauvette grisette ou le Bruant ortolan par exemple) vivants en milieu agricole depuis les années 1990. Leurs populations se sont réduites en moyenne d’un tiers en 15 ans et les chiffres montrent que ce déclin s’est encore intensifié en 2016 et 2017.

graphique

 

Indicateurs STOC 2017, les pourcentages correspondent à l'évolution moyenne des populations de 1989 à 2017.

Ces résultats nationaux sont confirmés par une seconde étude menée à une échelle locale sur la Zone atelier « Plaine & Val de Sèvre » portée par le CNRS. Depuis 1995, des chercheurs du Centre d’études biologiques de Chizé suivent chaque année, dans les Deux-Sèvres, 160 zones de 10 hectares d’une plaine céréalière typique des territoires agricoles français. En 23 ans, toutes les espèces d'oiseaux de plaine ont vu leurs populations fondre : l’alouette perd plus d'un individu sur trois (-35%) ; avec huit individus disparus sur dix, les perdrix sont presque décimées.

Ce déclin frappe toutes les espèces d’oiseaux en milieu agricole, aussi bien les espèces dites spécialistes - fréquentant prioritairement ce milieu -, que les espèces dites généralistes - retrouvées dans tous les types d’habitats, agricoles ou non. Or d’après les données issues du STOC, les espèces généralistes ne déclinent pas à l’échelle nationale, la diminution constatée est donc propre au milieu agricole

Quelles hypothèses pour expliquer ce déclin ?

Pour les chercheurs, cette disparition massive observée à différentes échelles semble liée à l'intensification des pratiques agricoles ces 25 dernières années, plus particulièrement depuis 2008-2009. La dernière décennie a été notamment marquée par la fin des jachères imposées par la politique agricole commune, par la flambée des cours du blé et par la généralisation des néonicotinoïdes, un insecticide très persistant.

L’effondrement des populations d’oiseaux est certainement fortement lié à la chute du nombre d’insectes. Ainsi, en octobre 2017, une étude allemande montrait un déclin de 76 % des insectes en 27 ans ! Les auteurs indiquent que l’intensification de l’agriculture, incluant la disparition des haies et l’utilisation de néonicotinoïdes, est associée à un déclin global de la diversité des plantes, des insectes, des oiseaux et d’autres espèces communes.

Avec de telles hypothèses, l’objectif des scientifiques n’est pas de pointer du doigt les agriculteurs mais bien d’alerter sur l’urgence de travailler avec tous les acteurs du monde agricole pour accélérer les changements de pratiques ! En communiquant aussi largement, les chercheurs souhaitent également informer les citoyens (y compris les plus jeunes) des menaces qui pèsent sur la biodiversité pour leur permettre d’agir à leur échelle (par le choix de produits respectueux de la biodiversité par exemple).

Pour aller plus loin...

Voici quelques ressources pour compléter cette newsletter :

 

Le discours de Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique et solidaire, à l’Assemblée Nationale :
https://www.youtube.com/watch?time_continue=5&v=704UQ0vd20g

 

Les oiseaux ne disparaissent pas qu’en France :
https://www.alternatives-economiques.fr//oiseaux-ne-disparaissent-quen-…

 

Un article des décodeurs du Monde :
http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/03/29/pourquoi-les-pes…